24 – 26 août – Rock en Seine

Un week end enfin ensoleillé et trois jours de festival au programme. Il n’en fallait pas plus pour décider deux de nos chroniqueuses de choc, Isatagada et Soraya Nigita, à se rendre sur place.

Vendredi 24 août

Il est toujours agréable d’entrer en voiture dans le parc de Saint-Cloud, tel le châtelain en son domaine; on attend presque les domestiques en livrée à l’arrivée devant le château. La réalité nous rattrape assez vite, car les châtelains sont pléthore en cet après midi nuageuse mais sèche. La sécheresse, néanmoins, caractérise plus le ciel que le sol. ô bonheur, je vais enfin faire mon premier festival dans la boue ! Début des festivités sur la scène de la cascade avec le groupe Rock and Roll, assez inconnu ‘et qui le restera’ ajoute Alain qui ne semble pas apprécier non plus. A vrai dire j’ai déjà tout oublié de leur prestation une heure plus tard.

Rodéo Massacre‘, jeune groupe francilien leur emboîte le pas, pas seulement en ce qui concerne l’horaire mais aussi pour le désintérêt total qu’évoque leur musique à mes oreilles. Lookés branchouille, ils n’ont pas grand chose d’autre à vendre …

Je commence à me demander si je ne suis pas en train de virer vieille-conne-blasée, et je ne suis pas loin de penser que je viens du même temps que les ‘Dinosaur Jr‘ dont les cheveux longs du du leader Jay Mascis sont devenus gris. Ceux là font du bon vieux rock qui envoie me dis-je en écoutant leurs guitares noisy bien lourdes. Moué, je me sens un peu désespérée. Il doit quand même une alternative autre que le jean slim ou la Harley …

Je me dirige donc avec espoir vers la grande scène où ‘Mogwai‘ est programmé à 17h, horaire bien étrange pour ce genre de musique. Je plaque tout le monde pour m’incruster au troisième rang. Pour ceux-là je veux être dedans, histoire de mettre toutes les chances de mon côté si jamais ils parvenaient à me faire décoller. Et soulagement, c’est le cas ! Avec leurs trois guitares plus une basse et une batterie, les ‘Mogwai’ me font tout oublier. Ce n’est pas trop tôt ! Je ferme les yeux, je me laisse remplir des vibrations et c’est parti pour le voyage. Zéro communication avec le public, attitude autiste garantie sur facture. La communion ne se fait que paupières baissées, passeport obligé d’un voyage d’une rare intensité. Ecouter l’album c’est une chose, mais recevoir cette musique là physiquement, la laisser vous remplir, c’en est une autre. Fantastique.

Je flotte encore un peu pour ‘The Shins‘, qui finit de me réconcilier tout à fait avec le festival. Ces américains indie nous livrent une pop folk à la fois mélancolique et dansante qui me plait tout à fait. Je pense un peu aux Guillemots que j’adore; malheureusement, au bout de trois morceaux j’ai l’impression d’en avoir entendu assez …C’est l’heure d’avaler quelque chose pour ceux qui ont faim, et de se promener un peu dans les allées du festival. La mode est aux collants et aux bottes, personne n’arrive à croire qu’il ne pleut toujours pas, et c’est vraiment le miracle de Rock en Seine cette année. Mais la pluie diluvienne de ces derniers jours rend le sol gadouilleux et glissant; il faut éviter les mares dans tous les coins et surtout les festivaliers couverts de boue qui vous courent après pour vous faire payer votre photo !

Emilie Simon‘, en comparaison, est toujours aussi propre. Elle a l’air tout droit échappée d’un conte de fée, avec sa robe blanche constellée d’étoiles noires et son chignon de princesse. Elle est sublime, loin des obscénités sexistes que des abrutis se mettent à hurler à son entré sur scène. Sa musique expérimentale est aussi jolie à regarder qu’elle, avec ses bruits d’eau entre autres. Tellement joli et propre que c’est un peu trop justement. Trop joli et trop propre.

Retour sur la grande scène avec ‘The Hives‘ et son leader mégalo Pelle Almqvist qui a la parole facile. Il interpelle sans arrêt le public : ‘This song is great. Do you agree with me ? Doo you agree with yourself ? Cause I agree with myself ! And when I agree with myself, let me tell you, this is gonna be great !!!‘. Du grand n’importe quoi, qui d’habitude m’agace et finit cette fois par emporter mon adhésion. Ce type là a besoin du public, ce type là VEUT l’assentiment du public (‘why are you so quiet french people ?‘), et il ira le chercher, ce qui est finalement très touchant. D’autant qu’il l’obtiendra en fin de compte, avec une musique ‘garage pop’ (ce n’est pas moi qui l’invente, c’est le journal du festival, mais le terme est assez bien senti !) qui a, en tout cas, fait danser tout le monde et créé une ambiance de bonne humeur et de fête à un festival qui en avait bien besoin.

Fin de cette première journée avec les très attendus ‘Arcade Fire‘ de Montréal, qu’on ne présente déjà plus. Outre le couple de chanteurs Win Butler (avec dans le visage un mélange de Marlon Brando et d’Elvis, jeunes évidemment) et Régine Chassagne, ils sont huit à partager la scène, soit 10 artistes pour la plupart multi instrumentistes (guitares, piano, accordéons, violons, tambours, …) dans un joyeux bordel qui embarque tout le monde. On ne sait plus ou poser les yeux ou les oreilles dans ce spectacle festif où chaque protagoniste en fait plus que sa part comme en témoigne par exemple une violoniste que l’on surprend à hurler les paroles alors même qu’elle n’a aucun micro. Tant de fête et de bonheur d’être sur scène sont fatalement communicatifs, et les ‘Oooooh oh oh oh oh oh oh, oh oh oh oh oh oh oh, oh oh oh oh oh oh oh, oh oh oh oh oh oh oh’ du public accompagneront la sortie des festivaliers longtemps après le départ de la troupe, après toutefois un rappel amplement mérité. Mis à part l’ambiance, il est vrai unique, je n’arrive pas à hurler au génial comme beaucoup. Je leur reproche toujours de me donner l’impression que je vais à mon tour partir en vrille, avec la frustration chaque fois d’être arrêtée dans mon élan sans bien savoir pourquoi …

Fin de cette première journée, alors que j’entends sur le chemin le son de ‘Unkle‘ que j’avais complètement oublié et qui me fait regretter amèrement de ne pas être devant eux … Thom Yorke, Ian Astbury ou Richard Ascroft, qui ont tous prêté leurs voix à ces compo fantomatiques et planantes ont eu plus de discernement que moi …

Au moins à présent, je sais qu’ils existent et après tout, n’est-ce pas ce que l’on attend aussi d’un festival ?

Isatagada


Il doit être trois heures et quart lorsque je parcours enfin les premiers dizaines de mètres caillouteux de l’allée menant aux scènes du festival Rock en Seine, mi-triomphante, mi-épuisée par avance à l’idée du marathon de trois jours qui nous attend sur le terrain boueux du parc de Saint Cloud. Et ça commence fort. Mon entrée se fait en musique avec le rock branché des gravures de modes parisiennes du groupe Rock & Roll sur la Scène de la Cascade. Look de dandys débraillés, sans doute étudié jusqu’au dernier collier de perle ornant le cou de l’un des membres, les refrains en anglais n’en sont pas moins accrocheurs et jubilatoires. A l’image du tambourin balancé dans une foule aux proportions honorables étant donné l’heure, on peut dire que cette jeune formation ouvre avec panache la cinquième édition.

17h: Plus tard dans l’après-midi, c’est au tour de la pop folk française aux airs entêtants, à la fois mélancoliques et enjoués de prendre place avec les Hey Hey My My. Les deux Julien occupent ainsi la Scène de l’Industrie dans le cadre des révélations  » Avant Seines  » sélectionnées par un jury de professionnels. Certains n’ont pas attendu leur apparition à Rock en Seine pour découvrir ce groupe et interpréter avec eux Too Much Space, désormais leur titre phare. Le son est bel et bien au rendez-vous. Il est toutefois difficile de ne pas établir un parallèle avec leur récente prestation à Paris Plage, pleine d’humour et d’interaction, car alors qu’ils chantent ‘I need some time‘, nous festivaliers, en manquons justement (de temps) pour profiter pleinement de ce set.

Soraya Nigita

Samedi 25 août

16h45: Le deuxième jour, une paire de bottes encroûtée et un jean éclaboussé plus tard, je me dirige d’un pas hésitant de nouveau vers la scène  » talents à surveiller  » aux sons electro-pop de HelloGoodbye de la scène avoisinnante. Planning alléchant oblige, le Festivalier peut se retrouver confronté à des choix cornéliens.

Malgré la présence des Californiens de Cold War Kids sur la Grande Scène, Pravda récolte finalement bon nombre de suffrages et hérite d’une belle affluence à l’Industrie sous un soleil de plomb. Uma Thurman et Billy Idol ou Sue et Mac (qui a viré au blond), tels qu’on les prénomme dans le civil, volent rapidement la vedette à l’agent de sécurité survolté qui faisait son show depuis une demi heure. Et pourquoi pas après tout! Suite au succès radiophonique de Tu es à l’Ouest, ils font la couverture de Télérama Sortir à la veille du festival: dans les termes de ‘Billy’, les membres de Pravda sont de  » purs stars maintenant! « . Ils ont beau n’être ‘que’ deux sur scène, Pravda meuble de manière bluffante l’espace sonore et visuel par un habile jeu de jonglage musical sans pour autant négliger le dialogue avec le public, proposant même de raconter des histoires de blondes lorsque cède une corde de guitare…mais c’est sans compter sur l’adhésion des spectateurs qui profitent du blanc pour souhaiter un joyeux anniversaire au duo en chanson! Le set, très ‘chorégraphique’ où s’échangent à la fois instruments et regards complices, reflète les références très diverses du groupe. Punk, éléctro et rock, s’aventurant même du côté du métal: on ne sais plus trop…tout le paradoxe est là: Rock & Roll is impossible! Rock & Roll is dead! Vive le Rock! Rock & Roll is the Rock!

21 h: Cela faisait des semaines que le buzz durait, pourtant du côté de la Cascade, l’atmosphère semble encore détendue à une demie heure du retour fracassant des Rita Mitsouko sur (une grande) scène. Ce n’est qu’une impression. L’aire toute entière ne tarde pas à se remplir. La fébrilité est palpable. La foule s’emballe lorsqu’apparaît enfin une Catherine Ringer enchapeautée: les ‘Rita’ sont ici en terrain conquis.  » Beaucoup avaient dit que nous avions encore disparu! Mais en fait nous étions à Las Vegas où on jouait en première partie de Céline Dion « , taquine-t-elle avant de reprendre ‘Live in Las Vegas‘. A l’horizon, ballons blancs généreusement distribués au stand RATP virevoltent au rythme de leur propriétaires, tantôt bercés par le timbre grave empli de pathos de la diva, tantôt pogotant sur les grands tubes aux tonalités acides des Rita tels que Marcia Baila, C’est comme ça ou plus récemment Ding Dang Dong. L’assistance prend des allures d’un karaoké géant présidé par Catherine, désormais mèches au vent et les bras tourbillonant, et le flegmatique Fred. Lorsque le concert touche à sa fin, la foule, décidément  » bien excitée  » ne contient guère ses demandes de bis…et pourtant, annonce-t-elle, comme à des amis qu’elle est désolée d’avoir à renvoyer chez eux,  » le spectacle est terminé pour question d’horaires « .

Nombreux sont ceux qui s’attardent encore devant la scène lorsque les ondes déchirantes de Tool, qui a investit la Grande Scène, déferlent sur le site, tirant les malheureux de leur torpeur et faisant voler en éclats leurs derniers espoirs.

Soraya Nigita

Pour ce deuxième jour de festival, le sol est encore détrempé mais le soleil est bien présent cette fois. Conséquence immédiate : l’’’ambiance est aux tongs, aux maillots de bain, voire aux  » free hugs « .

La journée commence sous le signe de la bonne humeur sur la scène de la cascade avec les PuppetMastaz, de drôles de marionnettes qui balancent un hip-hop dansant et assez jouissif. Ce n’est pas franchement un style de musique que j’affectionne, je ne m’attarde donc pas. N’empêche que j’’’ai déjà le sourire aux lèvres !

Direction la grande scène avec The Fratellis qui ne m’emballe pas non plus, malgré que le nom a beaucoup circulé cette année. J’en profite pour donner sa chance à I Love UFO ce que je n’avais pas franchement prévu, vu les propos du groupe rapportés dans Télérama. Un type qui clame  » les programmateurs sont encore trop frileux  » et  » je sais qu’ I Love UFO peut tout défoncer à 20h sur la grande scène « , j’avais un a priori plutôt négatif. Or c’est eux qui avaient raison ! Le rock sans concessions de ces français d’Arpajon est propre à embarquer les foules, j’adore ! Le groupe donne énormément sur scène, a su rester authentique, et développe un son assez énorme, capable de rivaliser avec les plus grands groupes. C’est fort, sombre, relativement fascinant, et la prestation scénique ajoute à la qualité d’une musique inspirée par Sonic Youth ou encore les Pink Floyd. L’un des gros gros coups de cœur de ma journée.

Cold War Kids m’attend à présent sur la grande scène, exactement à la même heure que les français de Pravda qui jouent eux à l’autre bout du parc, ce que je regrette. J’aurais aimé voir en live  » Sue  » et  » Mac  » et hurler bien fort :  » je suis à l’est, tu es à l’ouest ! « . Ce sera pour une prochaine fois, gageons que ces deux là, qui ont fait déjà la première partie d’Indochine ou – excusez du peu – de Placebo, vont aller loin ; j’aurais l’occasion de les revoir sur scène.

Pas d’Amy WhineHouse à Rock en Seine donc, mais des Cold War Kids en remplacement dont la participation au printemps de Bourges m’avait fait acheter l’excellent album Robbers & Cowards (merci France 4). Je ne suis pourtant pas séduite plus que ça par ces quatre californiens, même si je n’ai aucune excuse à cela : je suis très bien placée (dans les tous premiers rangs), je connais les morceaux, même certaines paroles (et je ne serais pas la seule à chanter  » hang me up to dryyyyy  » – du morceau du même nom – ou  » i promised to my wife annnd children, i’ll never drink another drink as long as i live  » –  » We use to vacation  » -), le chanteur a bien cette voix très particulière aussi. Alors quoi ? Je les sens stressés, ultra-sérieux et concentrés, comme s’ils passaient un examen. Certainement très impressionnés. D’eux à moi, malheureusement, la transmission ne se fait pas. Reste leur musique génialement déstructurée, parfois flamboyante, toujours originale, qui se distingue du lot malgré tout. Il faut qu’ils digèrent, sans doute, ce succès qui leur est tombé dessus et qui les a mis aussi rapidement face à des dizaines de milliers de personnes. Manifestement, il va leur falloir s’y faire !

Jarvis Cocker (sans les Pulp), prend à son tour possession de la grande scène. On l’aura beaucoup vu cette année, avec ses grosses lunettes et ses vestes en velours, dans les magazines spécialisés. J’en étais restée au look intello et aux mauvaises critiques lues ça et là, et je pointais le bout de mes oreilles par simple curiosité snob, de celle qui dédaigne sans avoir néanmoins toutes les clés pour le faire. Or ce nouveau parisien n’avait absolument pas l’intention de me laisser repartir avec mon petit mépris ! Petites phrases en français, humour décalé, jeu de scène théâtral et musique pop à la fois classe, intelligente et très accrocheuse, le concert restera l’un des meilleurs de la journée, avec un public encore peu démonstratif , mais visiblement séduit. Vous avez remarqué comme à Paris, les gens sourient simplement du coin de la bouche lorsqu’ils découvrent un artiste qui leur plaît, et sont capables de sauter partout la fois suivante ? Je ne ferais pas mieux du reste, mais me voilà retournée comme une crêpe, avec la ferme intention d’acheter l’album. Convaincue.

Je reviens côté Saint-Cloud pour saisir de loin le dernier titre de Calvin Harris. Planant et mélodique, encore une découverte à parfaire un peu plus tard. Les filles de CSS ont déjà commencé leur set quand se faufilent dans la foule Philippe et Léonce des Milestone, qui foncent droit sur moi. Marrant de tomber sur eux, et dommage de ne pas pouvoir échanger plus qu’un rapide  » salut ça va, vous avez vu quoi ?  » compte tenu du niveau sonore ambiant : j’en aurais bien profité pour leur demander des nouvelles de la sortie de leur album, enregistré en Bretagne cet été. L’attention reste donc fixée sur les demoiselles qui me semblent très jeunes, et évoluent dans d’improbables tenues bariolées, au milieu de ballons colorés disposés en hauteur sur la scène. L’objectif affiché est de faire danser, sans prétention. Le public masculin surtout les attendait, pourtant ces brésiliennes sont  » fatiguées d’être sexy  » ( traduction française de leur nom  » Cansei De Ser Sexy « ). Elles devraient néanmoins ne pas trop cesser de l’être si elles veulent survivre ; leur musique seule, risque de ne pas suffire …

Je repars vers Sèvres et la grande Scène, où se produisent The Jesus and Mary Chain , reformés après des années d’inactivité, et qui semblent très attendus. Pas forcément par moi, qui ne les connais que de nom, mais bonne fille, je suis prête à parfaire ma culture rock avec ces incontournables presqu’inventeurs du rock noisy (c’est ce qu’on me dit, je répète ; j’espère que je ne contrarie personne). Mine patibulaire, pour ne pas dire gueule d’enterrement, le groupe écossais a surtout l’air de s’emmerder prodigieusement, et c’est communicatif ! Et si les deux frères ennemis avaient finalement bien fait de passer la main ?

A ce stade, enchaîner sans hurler avec les insupportables Terry Poison alors qu’il est déjà presque 21h tient du tour de force. On a beau se dire que c’est mal, que chaque groupe ou artiste, en cherchant bien, a forcément un truc vu que tout de même, s’ils sont là c’est qu’ils ont été sélectionnés par des professionnels hein, parfois on reste interdit. Elles viennent de Tel Aviv ? Parfait. Elles sont championnes de  » l’électro-groove  » actuellement ? Bah, si certains le disent … Quant à moi, rien à faire, rester là à écouter plus de trois titres des ces nanas en justaucorps rouge à cagoule et queue de lapin ou encore en serre-tête Minnie et haut doré façon couverture de survie tient de la mission impossible. Si vous voulez bien m’excuser, je passe mon tour !

C’est le moment de se perdre un peu dans les allées du festival, de passer du temps devant l’expo Craig Robinson et d’admirer les lumières qui se dessinent entre chiens et loups. Mais à 21h30, j’ai rendez-vous avec les Rita Mitsouko, quasi-tête d’affiche de la journée. Je suis accoudée à la barrière, on ne peut mieux placée, et ravie de l’être. Ca commence mal pourtant, avec un micro pour Catherine bien mal réglé ; on l’entend à peine, un comble pour cette rockeuse déjantée ! Ce problème résolu, je me rends compte rapidement que je ne peux m’empêcher de regarder ma montre. Les nouveaux morceaux y sont pour quelque chose, et ne parviennent pas à rivaliser avec la folie festive des anciens, qui font toujours danser le public (on pogotera même dans les premiers rangs). Fred Chichin est tout aussi inexpressif que Catherine Ringer est explosive, le contraste est saisissant. Le public en redemande, mais rien à faire, aucun rappel ne semble possible, et le couple revient simplement saluer, ravi de l’accueil et désolé de ne pouvoir satisfaire la foule qui réclame  » Andy  » à corps et à cris. Malgré sa pêche, les Rita n’ont pas si bien vieilli que cela mais ils restent culte, et je me dis avec une certaine tendresse que peu de groupes français peuvent se targuer d’avoir leurs morceaux joués dans presque toutes les fêtes depuis des années …

Cette deuxième journée de festival se termine avec Alpha dont je découvre la musique planante, encouragée en cela par plusieurs personnes. Le collectif s’est peu à peu dissout et sur l’album à paraître début septembre ne subsiste que la voix Wendy. Dommage car c’est surtout la voix black soul de Kelvin qui m’aura envoûté sous les étoiles ce soir … Je repars avec plus de regrets encore que la veille, d’avoir manqué Pravda et Calvin Harris donc, mais également les métaleux TOOL qui se sont livrés à un véritable festival, me dit-on …

Isatagada

Dimanche 26 août

Il est des hasards parfois, qui n’en sont certainement pas. De ceux, par exemple, qui ont fait que j’étais présente ce dimanche dès 14h devant la scène de la cascade pour écouter les Bat For Lashes tout début d’après midi. Alors que tout était fait pour que je passe à côté. Leur nom complètement inconnu, leur musique également, l’horaire de programmation surtout (14h, c’est bien tôt pour un concert). Alors quoi ? Par quel miracle a t’il fallu que sur les 45 groupes ou artistes présent à Rock en Seine, les seuls dont j’ai eu le temps d’écouter un extrait aient été les Bat for Lashes ? La réponse est forcément une évidence : La Magie. Et c’est bien normal après tout, puisque ces filles là sortent tout droit du pays des fées. On n’est pas obligé, d’ailleurs, d’aimer ou pas ce genre d’univers (les costumes, les maquillages) pour se laisser prendre au charme des compositions et de la voix enchanteresses de Nathasha Khan, anglo-pakistanaise émigrée à Brighton. Et pour ma part j’ai vécu là mon plus beau moment à Rock en Seine, envoûtée sûrement car sinon, comment expliquer ces larmes contre lesquelles je n’ai pas pu lutter et qui ont coulé ensuite, et jusqu’à la fin du set ? Deux claviers et deux violons, ou encore, des clochettes et un tambour ont servi – entre autres – d’écrin à la voix bouleversante de la chanteuse qui oscille entre Björk, Kate Bush ou Cat Power,  » mais en plus … « .  » En plus  » je ne sais pas bien quoi, d’ailleurs, mais tant pis ! Sur le moment, c’est ce que j’ai envie de dire tant l’émotion me saisit. Je repense à d’anciens ressentis sur This Mortal Coil, avec cette sorte de grâce aérienne et de pureté en plus, comme débarrassé du côté un peu malsain de ce genre d’ambiance. C’est magnifique mais pas dépressif. On pleure mais on ne reste pas centré sur soi. On se sent partir dans un genre de transe indienne qui accorde à la nature, aidé par les martèlement du tambour ou du bâton. On a les yeux et les oreilles grands ouverts, tout entiers tendus vers elle et de ces instants sublimes qui vous arrachent au temps et au monde, il est pas question d’en perdre une miette : il est si rare d’être émerveillé à ce point…

Les Housse de Racket me pardonneront – ou pas -, mais il est brutal de passer d’une fée à un tennisman. Difficile, dans l’état dans lequel je suis, de recevoir favorablement leur humour ( » on est super contents de jouer en première partie de Björn Björk ! « , les claviers sont rebaptisés  » Roland Garros « ), leurs déguisements (visière et bandeau en mousse au poignet inclus), leur  » concept album  » (ils vont raconter l’histoire de superstars du tennis) ou leur musique électro-pop-funk. Il paraît qu’ils bossent dur pourtant, qu’ils ont étudié le piano, les percussions et la guitare classique au conservatoire, qu’ils savent lire la musique, même qu’ils ont fait la première partie de Phoenix. Moi je reste plantée là, un peu hagarde encore après avoir flotté dans un tel coton, bien incapable d’être  » cool  » devant ces types branchés chic colorés et de recevoir leur musique pour danser. J’écoute pourtant, j’essaie de rester, je prends les photos de toute façon … Mais non, vraiment pas.  » Allez, c’est naze, on y va « . A l’impossible nul n’est tenu.

La musique plutôt tzigane de Devotchka ne me parle pas des masses non plus. Pourtant j’avais adoré la B.O. de  » Little Miss Sunshine « . Là encore c’est une histoire de goûts, la world musique peut illustrer magnifiquement certaines atmosphères mais en concert il faut aimer le genre, ce qui, à ma grande honte, n’est pas mon cas. D’ailleurs il y a trop de soleil (que c’est bon de pouvoir s’en plaindre !), c’est l’heure de faire une pause et de s’installer dans un transat pour boire une petite bière bien fraîche à l’ombre des parasols. On entend de loin la musique soit-disant R’n’B de Kelis, qui me semble bien plus mélodique pourtant, voire funk. Tant pis après tout c’est dimanche.

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