Si l’on doit résumer ce week-end au Furia à une phrase, on peut reprendre une célèbre contrepèterie belge : il fait beau et chaud.
Samedi 28 juin
Et il fait encore plus chaud sous le chapiteau de la scène trois, proche de l’entrée principale, où Sherkan est en train d’officier. C’est lourd et efficace, les riffs sont tranchants, la voix de Rempo fait le reste, et le tout a le don de mettre d’ores et déjà une bonne partie des festivaliers en jambes.
On passe le premier vallon pour arriver dans l’amphithéâtre naturel où se niche la scène principale. Survient alors l’impression de changer de lieu et/ou de temps avec la folk des Coming Soon. Après avoir réussi le tour de force de s’imposer déjà outre-Atlantique avec leur premier album (dont on peut retrouver des titres sur la B.O de Juno), ils étaient là pour se mettre dans la poche le public du Furia. On les sent encore un peu timides sur scène, mais malgré tout ils ont fait mouche, et il est fort à parier que leur belle aventure ne s’arrêtera pas là avec le buzz grandissant qui les entoure et les chroniques élogieuses qui accompagne leur album ‘New Grids‘.
Ça sent l’été, mais celle qui prend place sur scène nous dit préférer les ronces aux fleurs. Il s’agit de Mlle K, toujours dans son style rebelle et écorchée, qui vient défendre son nouvel album ‘Jamais la paix‘ dont elle propose déjà deux titres en ouverture. Et le public a l’air d’adhérer aussi bien aux nouvelles compositions qu’à celles de l’album ‘Ca me vexe‘ qui l’a révélée, ce qui est plutôt bon signe.
Nos pas nous mènent ensuite au chapiteau de la scène 3. Petite déception d’ailleurs au sujet de cette scène, que j’aimais beaucoup l’an dernier quand elle était totalement en plein air. Ce petit pré entouré d’arbres lui donnait un certain charme bucolique. Avec le chapiteau, on perd tout cela, et on perd surtout beaucoup en visibilité. Après, si on avait vécu deux jours de pluie, ça aurait constitué un refuge apprécié et le discours aurait sans doute été différent. Fin de la parenthèse pour s’intéresser à ce qui se passe sous le dit chapiteau, à savoir la prestation de Eths. Et une prestation de Eths ne peut laisser indifférent, soufflant sans discontinuer le chaud et le froid, le mélodique et le hurlé, autour d’ambiances travaillées.
Changement d’univers avec Mano Solo. C’est le genre de personnage qui n’a pas besoin d’un jeu de scène époustouflant pour imposer son charisme et prendre tout le monde aux tripes, quel que soit la génération. Le Furia est devenu l’espace d’un instant le bout d’jardin pas loin de l’A15 de Mano. Malgré la grande scène, on a une impression de proximité et d’échange, comme un après midi entre amis. Tout simplement un grand moment.
On quitte le poids des mots pour le choc du dub et de l’électro avec Zenzile. Je n’ai pas accroché à tous les morceaux proposés, mais certains sont de vrais petits bijoux, avec des influences multiples qui se croisent mais qui à chaque fois semblent tomber pile pour faire sonner juste.
C’est l’heure d’un break mérité, car les petites buttes à monter et descendre sous le soleil, ça donne soif ! Profitons-en pour faire un peu le point sur l’organisation. A ce niveau, pas grand chose à redire, l’ensemble paraît bien rodé, les bénévoles sont nombreux. Seul petit point noir peut être : avec cette chaleur les préfabriqués vendant les précieux jetons, sésames permettant de soulager les gorges sèches sont pris d’assaut et les files d’attente sont interminables. En revanche, on peut souligner quelques initiatives intéressantes, comme le fait de distribuer des cendriers jetables et de proposer des gobelets consignés pour les boissons. Le tout afin de préserver le site, qui est fort agréable.
Les gorges hydratées sont maintenant prêtes à crier pour BB Brunes. Mais on se rend vite compte que les cris ne sont pas tous là pour chanter les louanges du groupe. Un noyau dur s’est formé au centre du public avec la ferme intention de montrer qu’ils ne sont pas fans (euphémisme) par majeurs levés et jets d’objets. La sécurité est sur les dents, et des agents infiltrés dans le public attrapent pour l’exemple quelques fauteurs de trouble repérés. En tout cas, les BB Brunes sont peut être parmi les groupes de ‘teenage rock‘ ceux qui s’en sortent le mieux. Beaucoup de morceaux sentent quand même la guimauve, mais il y a malgré tout au milieu de tout ça quelques compos bien senties.
Alors que la nuit tombe, c’est l’heure d’un dernier détour par la scène 2 pour le Peuple de l’Herbe qui a drainé beaucoup de fidèles. Sur les planches, des machines, mais également des instruments et deux chanteurs virevoltants au phrasé entrainant. Ça dérouille bien avant de reprendre l’A15 direction Maisons-Alfort. Rendez demain même endroit !
Dimanche 29 juin
Pas question d’être en retard aujourd’hui, car ce sont les toujours excellents Wriggles qui entament cette journée. Et nous ne sommes pas les seuls à s’être dit cela : le site est déjà bien rempli en ce tout début d’après midi. Là aussi, des fans sont de sortie, il n’est pas rare de croiser quelques t-shirts à l’effigie des hommes en rouge. Ça fait bizarre de voir ce spectacle de jour et en plein air avec une fosse debout. Mais le tout donne une ambiance différente qui n’est pas déplaisante. Sur scène, le spectacle de la tournée ‘tant pis, tant mieux‘ est bien rodé, avec moins d’interludes du fait du temps de jeu réduit.
Au même moment, la scène deux termine ses balances, et c’est le début du concert d’Origines Contrôlées. Les Wriggles sont toujours en train de jouer, ce qui fait que les premiers morceaux se font devant des rangs clairsemés, mais très vite des vagues arrivent de la scène une pour vibrer aux sonorités orientales. Au programme : des reprises de morceaux écrits en France entre 1940 et 1980 par des immigrés, chantant notamment les difficultés rencontrées ou la nostalgie. Le tout pour rappeler que quitter son pays et ses racines n’est jamais un choix facile, et que ce qui fait un individu est plus son empreinte culturelle que son empreinte génétique.
Changement de registre avec les Cowboys Fringuants, qui propose sur des rythmes parfois endiablés entre rock et country des paroles ironiques ou drolatiques. Une découverte scénique pour moi qui donne envie de découvrir les albums.
De l’autre côté du festival, AqME et son public se déchainent : on sent que tout le monde est content d’être là. Thomas, toujours très à l’aise ponctue souvent les transitions entre les morceaux par un bon mot et n’hésites pas à aller au contact, quitte à en oublier la set-list. La ligne musicale n’est pas en reste, notamment avec les compositions issues du nouvel album ‘Heresie‘, bien rentre-dedans et ‘bien vénères’ pour citer Etienne (cf une des interviews qu’ils nous ont accordé) qui trouvent leurs puissances décuplées sur scène.
Un petit break est nécessaire pour nous remettre des ces émotions, on assiste alors tranquillement assis à l’installation de la scène et aux balances de Kaolin. On est un peu loin et d’ici c’est marrant, les roadies qui font les balances ressemblent à s’y méprendre aux membres du groupe. Ah ben non, à y regarder de plus près, il s’agit bel et bien des membres du groupes qui font leurs balances 🙂 D’ailleurs, le concert démarre sans transitions et sans sortie de scène. Peut être est-ce lié à cela ou pas, mais je trouve que le début manque un peu d’énergie et de conviction, autant sur scène que dans le public. Mais le désormais culte ‘Partons vite’ à le mérite de réveiller tout le monde, et les derniers morceaux se font sur cette lancée. Au final, l’impression rendue est plutôt positive.
Malheureusement, pour des raisons de santé le concert d’AaRON n’aura pas lieu. C’est dommage, j’étais curieux de voir ce que pouvait donner la collaboration entre le groupe et l’orchestre symphonique de Cergy-Pontoise. La déception est grande pour nous, mais je pense que la déception devait être grande également du côté des musiciens, car ce genre de prestation demande un certain nombre de répétitions, espérons qu’ils auront l’occasion de remettre cette expérience à une prochaine fois.
Du coup, le créneau horaire est occupé par Cali qui devait jouer plus tard dans la soirée. Et s’il y a quelque chose qu’on ne peut pas reprocher à Cali, c’est de s’économiser sur scène. Dès le premier morceau, il a réussi le tour de force de faire se lever tout le public, même les pentes de l’amphithéâtre naturel. Au programme, des classiques bien sur, dont une version très rapide et électrique de ‘Elle m’a dit‘, mais également des morceaux de son nouvel album ‘l’Espoir‘. Si l’album qui l’a rendu célèbre abordait surtout la vie quotidienne et les sentiments, ce dernier opus est beaucoup plus politisé, à l’image du single ‘1000 cœurs debout‘.
Un final en apothéose donc pour clôturer ces deux belles journées passées sur la base de loisirs de Cergy. Peu ou pas de déceptions, un site idéal, ça confirme l’impression de l’année dernière d’en faire un de mes festivals préférés.
Arnaud Guignant
Crédit photo : Marilou