Interview puissance trois à trois voix avec les Wriggles pour leurs nouveaux spectacle et album « Tant Pis ! Tant Mieux ! ».
La joie, le bonheur, le bordel, à prendre au troisième degré ou pas. Une réputation si sympathique qu’on ne peut décemment pas s’empêcher d’essayer de leur faire dire du mal, et même avec des cibles faciles … ça relève du challenge.
Retour sur la nouvelle formule Wriggles avec les trois intéressés.
HexaLive : Vous avez dix ans de carrière derrière vous, un succès bâti au bouche à oreille, pas mal de salles à votre actif, un succès d’estime … Qu’est ce qu’il vous faut de plus ? Quelle est l’étape suivante ?
Christophe : Ah non mais ça va bien là, on fait notre petit bonhomme de chemin comme dirait je sais plus qui !
HL : Donc la carrière internationale avec blagounettes et chansons en anglais, pas pour demain ?
Christophe : Ah, in english you mean !
Stéphane : On l’a déjà fait une fois, comme on essaye de varier les styles.
Frédéric : C’était quoi ?!
Stéphane : C’était « Lesson One »
Frédéric : Ah oui !
Christophe : « The sun is shining, the sky is blue … »
HL : Les birds chantent ! Vous avez vous-mêmes réalisé ce nouvel album. Comment vous est venue l’idée ?
S : On en avait vraiment envie.
HL : C’est plus une liberté qu’une contrainte ?
Tous : Oh oui !
S : On a fait une maquette en septembre, on l’a fait écouter aux gens super avec lesquels on travaille en disant « voilà ce qu’on aimerait faire, le cap à passer, ce serait de s’occuper des arrangements, est-ce que c’est d’accord ? ». Ils ont écouté, ils étaient d’accord alors on était contents.
HL : Et donc la maison de disques a validé par la suite, c’est ça ?
S : Oui voilà.
C : Ils nous ont suivis sur ce coup-là. On dit qu’on a réalisé tous les trois cet album -ce qui est vrai- mais il ne faut pas oublier qu’on n’était pas seuls à bosser dessus, c’était un travail familial avec Jérôme Favrot-Maës à la prise de son et au mixage, Michel Puyau aux arrangements vocaux et puis notre copain bassiste Thomas Huiban.
HL : Question scénique, vous portez les mêmes pyjamas depuis maintenant dix ans …
S : Des « costumes » !
C : Si on les portait depuis dix ans, ils ne seraient pas dans le même état ! Ils ont évolué à chaque spectacle.
F : C’est rouge.
HL : C’est une signature ?
S : Le rouge ? Oui.
HL : C’est votre côté communiste, c’est ça ?
(rires) tous : Ouh là !
C : Comme tu y vas !
S : Tiens, c’est marrant, ça !
HL : Vous savez, on fait pas mal de raccourcis …
C : Et la passion ?
S : Et la « pasión » ? L’amour ? L’énergie ?!
HL : Comment s’est fait le choix des titres live qui se retrouveraient sur l’album ?
F : On a vingt cinq nouvelles chansons dans le spectacle mais on ne voulait pas faire un album de vingt cinq chansons. L’une des premières choses qui nous a amenés à faire un choix, c’est qu’on a des chansons très théâtralisées, mises en scène avec parfois des chutes, alors autant pas vendre …
S : La chute de l’ours avant d’avoir tué la peau !
F : Et puis on avait tous les trois quelques idées, on en a discuté avec nos potes, notre manager Jean-Michel Mouron. On voulait que les chansons ne se répètent pas, que musicalement ça passe du coq à l’âne, que les thèmes ne soient pas les mêmes dans le fond et dans la forme. C’est ce qui a donné ce choix.
HL : Garder les chutes, c’est stratégique, c’est pas bête …
F : Oui, les pourries sont inclues dans le spectacle.
HL : Il y en a ?! C’est pas très vendeur, ça !
F : Oui, Steph’ écrit beaucoup en ce moment (rires)
HL : C’était fourbe, ça ! Et maintenant, une petite suggestion pour les lecteurs d’Hexalive. Vous qui êtes un groupe de scène, voire de plein air, vous avez une posologie conseillée pour l’écoute de cet album à la maison ? Un lieu, une activité idéale ?
F : Ah, tu vois, on nous a jamais posé cette question !
C : Attends, ça demande un petit temps de réflexion.
F : La vaisselle, je pense que ça marche bien. Une grosse vaisselle à faire, plein de potes qui sont partis et qui t’ont tout laissé à faire tout seul, un album de quarante cinq minutes, ça le fait !
S : Celui qui sort, là, je pense qu’on peut l’écouter tout le temps en fait, non ? Ceux d’avant, c’était plutôt « Hé viens j’v’t’faire écouter les Wriggles ! », il fallait au moins ça pour monopoliser une dizaine de personnes chez soi. Alors que là, la vaisselle, la voiture, les toilettes, le ménage …
C : ça dérange pas, t’entends pas.
HL : C’est un album à vivre au quotidien, c’est ça ?
C : Ben c’est un CD à pas écouter, alors c’est super, tu peux faire autre chose en même temps !
HL : Ceux qui disent « Hé viens j’v’t’faire écouter les Wriggles », qui c’est ? Votre public a changé en dix ans ?
S : Il s’est élargi ! Disons qu’on a toujours eu tous les âges dans notre public, toutes les population. C’est quelque chose qui est resté. On fait des salles rock depuis trois, quatre ans et on a un public jeune qui prend un peu plus de place qu’avant.
HL : ça boit, ça pogotte !
S : Ah ça pogotte !
F : ça slamme, même. Non, mais ça nous fait plaisir de retrouver trois générations à un spectacle, des familles qui viennent avec des enfants de douze ans, des grands de vingt-quatre et puis les parents et qui vont chacun y trouver quelque chose d’intéressant. On est satisfaits de ça, d’être assez larges sans même le faire exprès ! Loin de nous de faire des trucs de marché !
C : Pour les parents qui ont des adolescents, on sait que c’est pas simple …
S : Et puis c’est toujours difficile de parler à ses parents …
C : On a créé un lien peut-être.
HL : Les Wriggles ont donc une mission sociale, c’est ça ?
Tous : Oulà non !
S : Non, c’est une mission de coeur.
F : Oui, je crois qu’on a trouvé quoi faire pendant notre passage sur cette petite planète.
HL : Vous avez déjà fait votre propre première partie avec vos projets parallèles, ou ces derniers sont complètement indépendants ?
F : Non on ne l’a jamais fait, c’est autre chose. On s’est dit que ce serait un peu chelou.
C : Ce sont plutôt les projets parallèles qui se mélangent : Steph’ a déjà fait la première partie de Volo.
F : Je suis pas sûr de pouvoir enchaîner un Volo – Wriggles !
S : Et puis y’a un côté chelou à faire la première partie de son groupe.
HL : Et si vous pouviez -sans restrictions ni limites- choisir une première partie ?
F : Je sais pas s’il existent encore, mais bon : Rage Against The Machine !
S : Ce serait pas le même public, m’enfin : Saul Williams.
HL : Et si vous pouviez … pourrir un concert ?
S : Oh c’est pas joli !
F : Ah non, faudrait qu’elle soit là pour se défendre !
C : Même si j’aime pas du tout, je vais laisser faire. Je vais pas aller pourrir un concert parce que déjà, ça voudrait dire que j’y suis.
HL : Même pas François Valéry ?
C : ça voudrait dire que je suis à un concert de François Valéry donc ça ne serait pas possible.
HL : Depuis que le groupe s’est séparé de deux de ses membres (Franck Zerbib et Antoine Rejasse), il y a eu des changements de quel type ? Il y a eu refonte ou alors vous avez gardé une même ligne directrice ?
S : Comme changements, on a plutôt retiré de l’instrument en nombre, sur scène comme sur l’album. On est vraiment retournés à la guitare – voix sur scène et guitare – voix – basse sur l’album.
HL : Quelque chose de relativement minimaliste …
F : Voilà. On a l’impression -et c’est ce qu’on nous dit en retour- que cet album reste dans une continuité d’esprit ou de cadre artistique, avec, en même temps, quelque chose de changé, une espèce de sang frais, ce qui est assez logique puisqu’on a du réinventer pas mal de choses. On est assez contents.
HL : Et ça vous donne un objectif de plus.
S : Oui, puisque ça demande de tout refaire.
F : Ils étaient importants, Franck et Antoine en plus de dix ans de tournée. On avait conscience qu’on perdait tout ce qu’ils apportaient. Dès qu’on a pris la décision, tous les trois, de continuer à bosser et s’amuser ensemble, y’avait un côté « dos au mur » qui faisait qu’on déconnait, faisait les cons et était sérieux quand il le fallait, on a foncé en se disant « advienne que pourra ».
C : Ou « advienne que pourrit ».
S : Lui, c’est notre responsable marketing (rires).
HL : D’ailleurs, le marketing, c’est une chose qui a changé depuis que vous êtes signés chez Atmosphériques ? J’ai quand même vu une affiche dans le métro en venant !
C : Y’a plus de moyens que quand on n’avait pas de maison de disques, c’est sûr.
HL : Les réactions sur cette nouvelle formule Wriggles sont très positives, les spectateurs disent que l’esprit est le même, ça doit être satisfaisant !
Tous : Mais oui !
F : Puisqu’on te dit qu’on est très heureux ! On a beaucoup de chance.
HL : Et vous êtes très polyvalents. Il y a un type de salle dans lequel vous préférez jouer ?
F : C’est vrai qu’on peut passer du centre culturel à une salle rock le lendemain, avec les gens debout et je crois que c’est ce qui nous amuse : faire un spectacle tout terrain qui s’adapte, selon la taille de la scène et de la salle.
S : Moi ce que j’aime bien, c’est quand le public n’est pas gagné d’avance, que ce soit le public des centres culturels ou des salles rock. Quel que soit le lieu, on chante les trois – quatre premières chansons et on sait pas encore où on va …
C : C’est ce qu’on vit en ce moment, comme on joue un nouveau spectacle que les gens ne connaissent pas.
F : Et il y a des gens courageux dans le public des centres culturels : ils viennent sans même savoir qui jouent et ils restent jusqu’au bout !
HL : Résumons : Vous touchez plusieurs générations, vous jouez dans tous types de salles, ça marche bien. Vous êtes en quelque sorte accomplis ! C’est pas triste à trente ans ?
S : On espère qu’on en a encore un peu à faire !
C : Y’a d’autres désirs pour l’après, on a encore envie de faire des choses … Non, heureusement qu’on n’est pas accomplis !
HL : Vos équivalents en France ?
F : Il y en a plein !
C : Les Ogres de Barback par exemple.
S : Des gens heureux qui font ce qu’ils aiment.
HL : Vos points communs avec ces gens ?
F : C’est la scène, un public qui se rencontre et qui grossit par le bouche-à-oreille, le travail scénique, les tournées et pas tellement les supports médiatiques qui coûtent cher. Alors on en profite parce que ça va très bien.
HL : Vous êtes un groupe de scène, alors, le téléchargement illégal, bien ou pas bien ?
F : Je parle trop où c’est bon ?
C : Non, non, attaque !
F : écoute, moi j’attends de voir. C’est le genre de phénomène que j’ai envie de comprendre dans le temps, après -optimiste- je me dis que le CD à quatorze euros, pour certaines personnes c’est cher et le bon côté des choses, c’est que sans ça certaines personnes n’auraient jamais eu accès à nos chansons. Quand j’étais adolescent, je copiais ma musique sur des cassettes. Plus tard, j’ai compris que y’avait des artistes, des gens derrière, alors je rachetais en CD mais si j’ai bien compris, les majors sont toujours bénéficiaires à l’heure actuelle.
HL : Et pour finir sur une note exagérément glauque et raccord au climat, que voulez-vous qu’on retienne de vous après votre … mort ?
F : (rires) Oh la question !(…)
C : Voilà, voilà.(…)
C : Waganafou ?
S : Oui voilà : waganafou.
F : Waganafou.
interview réalisée par Nikolina